Photo de Vincent Dumez

Ce que le vécu apprend au soin : le parcours de Vincent Dumez  

Dans cette section :

« Je suis d’abord un patient. Un vieux patient. » 

C’est ainsi que Vincent Dumez se décrit, malgré un parcours riche de rôles et de responsabilités. Ancien militant, enseignant, administrateur, cofondateur du programme de patient partenaire à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, il siège aussi à plusieurs conseils d’administration, dont celui d’Agrément Canada. 

Patient de longue date et figure de proue du partenariat patient au Québec et à l’international, il a grandi avec l’hémophilie, dans un rapport constant au système de santé. Comme beaucoup d’hémophiles de sa génération, il a été touché par l’affaire du sang contaminé, un épisode marquant de l’histoire canadienne qui a mis en lumière de profondes failles en matière de sécurité. 

De cette blessure collective, Vincent a fait un point de départ. Non pas pour fuir, mais pour comprendre. Pour transformer l’injustice en action, la douleur en savoir, le silence en dialogue. Il a choisi de rester. De rester et d’agir. 

Ce que le vécu apprend au système 

Ce qui aurait pu devenir un repli, un renoncement, est devenu chez Vincent Dumez une volonté tenace de comprendre et de mobiliser. Très tôt, il a cherché à faire entendre une voix différente dans les discussions sur la qualité et la sécurité des soins : celle des personnes directement concernées. 

Après plusieurs années d’engagement auprès des communautés, notamment auprès des personnes vivant avec le VIH, Vincent Dumez fait le pas vers l’univers académique, décidé à y porter la voix des patients. Il contribue alors à la création d’un programme de partenariat patient à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, insufflant un courant nouveau où l’expérience vécue devient, elle aussi, source d’apprentissage. Ce programme, désormais bien établi, place des patients partenaires dans les salles de classe, les comités d’amélioration continue et les instances décisionnelles. Non pas en retrait, mais au cœur de l’équipe. 

Ce modèle, qui fait aujourd’hui école au Québec comme à l’international, repose sur une idée simple : on ne peut pas former des cliniciens compétents sans leur permettre de comprendre ce que c’est que de vivre avec une maladie, une perte d’autonomie, une trajectoire de soins longue ou complexe. 

Pour Vincent, la sécurité ne se décrète pas. Elle se tisse dans la relation de soin. Elle repose sur le dialogue, la reconnaissance des savoirs de chacun, et le partage des décisions. 

Nommer les savoirs pour mieux les transmettre 

Vincent Dumez défend depuis longtemps une idée qui dérange encore certains milieux : les patients savent. Ils accumulent, au fil du temps, une connaissance fine de leur corps, de leur condition, de leur système de soins. Ils savent ce qui les aide, ce qui les blesse, ce qui manque. 

Mais ces savoirs, bien que précieux, sont souvent invisibles. Trop rarement nommés, encore moins valorisés. Pour y remédier, Vincent a codirigé l’élaboration de la première typologie internationale des savoirs patients. On y distingue, entre autres, les savoirs médicaux expérientiels, les savoirs d’autogestion, les savoirs relationnels, les savoirs de navigation dans le système et les savoirs culturels. Une façon concrète de reconnaître que les patients sont bien plus que des bénéficiaires : ils sont aussi des porteurs de connaissances utiles à la sécurité des soins. 

Ce travail s’est aussi traduit par des outils pratiques. Au Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP), Vincent a contribué à créer des parcours d’apprentissage adaptés à différentes pathologies. Ces ressources permettent aux patients de mieux comprendre leur état de santé, de poser des questions éclairées, de reconnaître les risques, de participer activement aux décisions qui les concernent. En habitant pleinement son rôle, un patient mieux informé ne protège pas que lui-même. Il aide aussi à prévenir des complications évitables et, à sa manière, allège la pression qui pèse sur les équipes soignantes. 

Naviguer les risques, ensemble 

Pour Vincent Dumez, la sécurité prend racine dans la capacité d’un patient à comprendre ce qui lui arrive, à savoir à qui s’adresser, à prendre des décisions éclairées. C’est pourquoi il insiste sur l’importance d’un accès réel, intelligible et équitable, à l’information en santé. 

Mais son engagement repose d’abord sur une réalité vécue : celle d’un patient qui a dû apprendre à se protéger. « Depuis 35 ans, je me suis forgé une posture : celle d’un acteur de ma propre sécurité. » Hospitalisé à de nombreuses reprises, Vincent estime avoir lui-même évité entre cinq et dix incidents indésirables, dont certains auraient pu être graves, voire mortels. Ce filet de sécurité, dit-il, repose d’abord sur lui… et sur ses proches. 

Il insiste d’ailleurs sur leur rôle essentiel. Il se souvient d’un moment en particulier, où son père a permis d’éviter un bris de sécurité important pendant une hospitalisation. Dans bien des situations, ce sont les proches qui perçoivent un détail qui échappe, qui rappellent un renseignement oublié, qui insistent lorsqu’un malaise s’installe. Pourtant, ils sont encore trop souvent considérés comme de simples accompagnateurs, voire comme des obstacles. 

Et pourtant, plus une personne est vulnérable, parce qu’elle est jeune, âgée, en détresse ou fragilisée par la douleur, plus ses proches deviennent des partenaires incontournables. Les inclure dans les discussions cliniques, leur offrir des repères clairs, les autoriser à intervenir : c’est aussi cela, prendre soin. 

Vers une culture partagée de la sécurité 

Pour cheminer, il faut des repères. Et bien souvent, ce sont les communautés qui les offrent. Pour Vincent Dumez, les associations de patients, les groupes de soutien et les organismes communautaires jouent un rôle fondamental dans l’apprentissage, le réconfort et la mobilisation des savoirs. Ce sont des lieux où l’on partage ses peurs, ses trouvailles, ses questions. Des lieux où l’on apprend à mieux se connaître, à se défendre, à agir. Des lieux où les savoirs se croisent et se renforcent. 

La sécurité, dans cette perspective, ne relève pas uniquement du système. Elle devient une culture. Un engagement collectif. Un fil conducteur tissé entre les patients, leurs proches, les professionnels, les gestionnaires, les chercheurs et les décideurs. 

Car la sécurité des soins n’est jamais acquise. Elle se construit et se reconstruit, chaque jour, dans chaque rencontre. Elle exige de la rigueur, mais aussi de l’humilité. Elle repose sur des systèmes robustes, mais aussi sur des liens humains. Et elle appelle à une responsabilité partagée. 

S’informer. Écouter. Questionner. Se faire entendre. Prendre part. 

Que l’on soit professionnel de la santé, usager, proche aidant ou simple citoyen, chacun a un rôle à jouer pour que les soins soient plus sûrs. Et parfois, ce rôle commence par une question posée. Un doute exprimé. Une vigilance partagée. 

Parce qu’au cœur même de la sécurité, il y a un principe fondamental : celui de ne jamais faire les choses pour les gens, mais avec eux. 

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